Virginie Barret
« Non mais vraiment, ces grands pics sombres et enneigés, le froid, le noir… n’allez pas me dire que ce n’est pas un paysage dur, austère et hostile! ». À l’écouter, difficile de croire que Damien Tremblay est fou du Grand Nord.
Né d’un père Québécois et d’une mère Française, il pose ses valises à Whitehorse en 2004 après des études d’histoire en France. La région le fascine depuis l’enfance. À l’époque, il passait ses vacances avec son père, trappeur au Québec. Le goût pour les immensités sauvages et glacées, Damien l’a dans le sang. Et après 9 ans dans ce « coin du monde », comme il l’appelle, ce passionné de photographie décide de s’essayer à l’écriture. Avec une idée précise en tête : « Il y a beaucoup de choses qui ont été écrites sur le Yukon. Mais j’ai remarqué qu’à chaque fois, le thème de l’isolement ne sert que de toile de fond aux histoires. Alors j’ai voulu, pour la première fois, en faire le sujet principal d’un ouvrage ». Mais qu’entend-il exactement par « isolement »? « C’est une notion complexe. Pour moi, ce n’est pas qu’une question de distance. C’est aussi un éloignement psychologique. La séparation d’avec la famille et les amis pour commencer, car beaucoup de gens au Yukon viennent d’ailleurs »
Pendant plus de deux ans, Damien étudie en profondeur ce concept qui, selon lui, définit si bien la région Il se documente et s’inspire d’autres auteurs, tels que Gary Lopez ou Gaston Bachelard. Le résultat : « Ce n’est ni de l’Histoire, ni de la géographie, ni de la philosophie, ni de la poésie, mais un mélange d’un peu tout ça ». Un livre au style paradoxal, comme les idées de l’auteur : « Le Yukon est un endroit triste, et j’adore ça ».
Pour Damien, impossible d’aborder le thème de l’isolement sans parler de sa fidèle compagne, la mélancolie. « Mais pour moi, ce n’est pas une mélancolie négative, c’est une tristesse créative, qui nourrit l’imagination! » Les brochures touristiques de la région, affichant des familles, tout sourire, sur fond de ciel bleu, n’ont aucun sens pour l’auteur. « Ce que les voyageurs viennent chercher ici, c’est du Jack London, des loups, des ours, de l’aventure. Et dans toutes aventures, il y a des moments de douleur ».
Le livre est en anglais, un choix logique pour Damien, qui n’est pourtant pas bilingue : « J’ai appris l’anglais sur le tard, mais pour moi, c’était aller jusqu’au bout de mon aventure yukonnaise. En français, ça aurait été un livre totalement différent. Je suis satisfait du résultat ». Et il n’en démord pas : aussi isolé et mélancolique soit-il, le Yukon reste son endroit préféré sur Terre.
Titre : Yukon Dreams : Remoteness and Mystique of the Corner of the World
Éditeur : Paraselene Publications
Pages : 116
Langue : Anglaise
Année de publication : 2013